• C'est si simple de compliquer les choses.

    Même si je ne joue plus beaucoup aux jeux vidéos, je pense qu'on peut me considérer comme un retrogamer. Enfin, en partie en tout cas.

    Ne vous détrompez pas, ce ne sont pas les graphismes qui me dérangent, je pense moi aussi qu'il vaut mieux un beau jeu qu'un laid. Mais même si je joue parfois à ceux sortis récemment, je ne peux m'empêcher d'apprécier ceux d'il y a de nombreuses années, à l'époque de la fin de la 2D, où les machines augmentaient en puissance et les jeux en profitaient pour devenir parfois magnifiques, et aux débuts souvent abominablement laids mais pas forcément mauvais de la 3D.

    Ces vieux jeux ont un grand avantage sur leurs successeurs : cela leur arrivait d'avoir des histoires bien plus complexes que ceux d'aujourd'hui, et ils tapaient plus fréquemment dans l'originalité. Actuellement, j'ai réellement l'impression que la plupart des équipes de concepteurs concentrent tout leurs efforts sur les graphismes et c'est tout. Après tout, le reste, ça ne se voit pas sur la boîte du jeu et les bandes-annonces.

    Mais surtout, le principal avantage de l'ancien sur le récent, c'est que ce premier regorge de jeux horriblement difficiles où tu en sues, où tu risques de crever misérablement au moindre obstacle, où tu rognes peu à peu du terrain en t'y mettant bec et ongles et en priant pour trouver rapidement un point de sauvegarde (si jamais il y en a). Ils sont aussi pour pas mal d'entre eux distribués en abandonware, et ça, c'est pas négligeable quand on a aucun budget, mais ce n'est pas la question ici.

     

    Quel intérêt, me direz-vous, à jouer à un jeu infaisable, source de morts prématurées, répétitives et frustrantes ? Mis à part l'intérêt masochiste ? Le défi, rien de plus. On le connait tous, ce sentiment de satisfaction, apparaissant après avoir accompli une tâche difficile, répétitive, éreintante, quand on voit enfin notre œuvre achevée. Et ça marche aussi bien pour les jeux difficiles, ceux qui y jouent l'auront déjà constaté.

    C'est ça, pour moi, un vrai jeu. Il te dit « Finis-moi si tu peux », et il se fout de ta gueule par l'intermédiaire d'un gros game over coloré parce que, évidement, tu te plante lamentablement aux premières tentatives. Et un vrai bon jeu, c'est celui qui te tient malgré tout en haleine, qui t'incite à recommencer, encore et encore, jour après jour, juste pour le plaisir d'avoir le dernier mot et de fêter la victoire en dansant dans le salon et en mugissant de joie. Quels jeux d'aujourd'hui, souvent simples et ne durant pas plus d'une après-midi, a su vous procurer une telle extase ? Personnellement, jusque là, je n'en ai trouvé aucun.

     

    Maintenant, pourquoi je vous parle de jeux vidéos ? Tout simplement parce que j'aime bien partir d'un sujet qui n'a strictement rien à voir pour revenir sur celui qui nous intéresse sur ce blog. Ça instaure une sorte de suspense, alors, vous allez attendre encore un petit peu.

    N'en déplaise aux adversaires du jeu vidéo, je lui attribue quelques vertus. Tout d'abord, selon moi, il n'augmente pas la violence, c'est pour la plupart des joueurs juste un mélange de jeu de société et de punching-ball en un peu plus sophistiqué. Tendez un sac de frappe chez vous, ou inscrivez-vous à un club de sport, tout le monde vous dira que c'est une manière saine de se défouler. De plus, des scientifiques ont prouvé empiriquement qu'ils amélioraient les réflexes, et, à mon humble avis, les vieux jeux difficiles doivent aussi améliorer, entre autre la patience, la persévérance, la concentration et le goût du défi.

     

    La patience, la persévérance, la concentration, le goût du défi. Ce sont quatre des vertus de l'esclave et du Maître. Et de tout les autres aussi, mais ça, c'est hors-sujet.

    Bien évidement, je ne suis pas en train d'essayer de convaincre tout le monde de jouer à des jeux vidéos, on y joue si on en a envie (ou si le Maître le veut). Mais je me dis que la vie en tant qu'esclave est comme un vieux jeu vidéo : le Maître a de fortes exigences, et on se plante lamentablement encore et encore jusqu'à apprendre enfin à le satisfaire. Ce qui lui permet d'augmenter un peu plus ces exigences et de recommencer.

    J'ai déjà mentionné auparavant plusieurs théories, plusieurs raisons possibles au fait de vouloir devenir esclave, en voici une autre avec le goût du défi, le goût de la difficulté. Ou, si vous préférez, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué. La réponse est simple, elle : parce que, quand c'est compliqué, réussir est beaucoup plus exaltant.

    Cela me fait penser à la religion et aux règles sociales. Les vils athées marginaux tels que moi les considèrent souvent, l'un comme un moyen inefficace et liberticide de se rassurer par rapport à la mort, et l'autre un moyen inefficace et liberticide de se rassurer par rapport aux autres et à leurs intentions.

    Je me demande maintenant s'il n'y a pas aussi, plus ou moins inconsciemment, une volonté de tout complexifier, de rajouter de nouvelles règles contraignantes pour jouer la vie en mode Hardcore. Beaucoup de personnes considèrent qu'une société rigide est meilleure qu'une société libertine, et ce n'est peut-être pas dû uniquement à un mouvement conformiste. Par exemple, n'avoir pas le droit de coucher avant le mariage peut rendre le sexe plus mystérieux, plus attirant, plus jouissif que si on peut simplement le faire n'importe quand avec qui on veut, et plusieurs maris ou femmes infidèles ont ouvertement avoué que le principal intérêt, pour eux, dans les relations extra-conjugales, c'est le goût du risque, récurrent dans les violations de tabous et d'interdits.

     

    De mon point de vue, on vit dans une société où globalement, on obtient de plus en plus de libertés individuelles et de moins en moins de responsabilités, et beaucoup de gens se retrouvent perdus, incapables de trouver un sens à leurs vies. C'est selon moi une sensation de manque de défi, et le BDSM est pour certain une solution à ce problème : d'un côté, on perd la liberté ; de l'autre, on gagne les responsabilités. Avancer sur ce chemin, apprendre à améliorer son service ou à raffermir son emprise est un défi posé conjointement, que le Maître et l'esclave affrontent en s'associant, et cela donne, étonnamment peut-être, beaucoup de sens à une vie, cela lui donne un objectif à atteindre, progressivement, en grignotant peu à peu le terrain.

     

    Un sujet de dispute récent entre mon Maître et moi (ben oui, ça arrive les disputes), c'est sa manie de dire que ce que je fais est satisfaisant, et moi, en bon esclave débutant, perfectionniste et impatient, ça me contrarie. Donner ce qui est satisfaisant, ce n'est pas suffisant, c'est donner juste une partie de ce que je peux donner, et ça me donne la désagréable impression que mon Maître se contentera de ce qui est tout juste acceptable sans jamais augmenter ses exigences. Je ne veux pas donner satisfaction, je veux donner l'excellence, donner tout ce que j'ai, de gré ou de force : c'est un objectif beaucoup plus difficile, et beaucoup plus exaltant. On ne devient pas esclave pour se tourner les pouces non plus.

     


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